La vidéo dans tout le sens
Création audiovisuelle | Marketing digital
Quelle histoire, quelle expérience souhaitez-vous partager dans votre vidéo sur internet ? Quels sont les nouveaux usages relatifs à sa consommation ? Quel sens donnez-vous aux contenus audiovisuels que vous concevez ? Votre stratégie éditoriale et promotionnelle existe-t-elle ? Quelles sont les exigences auxquelles doit répondre un contenu audiovisuel diffusé sur le web pour être de qualité ?
En 2020, 720 000 heures de vidéos sont ajoutées chaque jour sur YouTube, soit 30 000 par heure. La plateforme détenue par Google est le deuxième réseau social le plus plébiscité dans la monde, juste derrière Facebook. Elle est utilisée par près de 2 milliards d’utilisateurs chaque mois et totalise 82 000 vidéos vues par seconde. Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Néanmoins, ces données éludent certaines réalités. Entre les intérêts pluriels du géant américain et ceux des annonceurs, le rendu qualitatif tout comme l’attrait informationnel et de divertissement d’une grande part des contenus postés sur la plateforme s’en ressentent. D’où la volonté de certains de faire émerger d’autres modèles. Une autre approche de la vidéo sur internet.
Quels sont les nouveaux usages relatifs à sa consommation ? Qu’impliquent-ils quant aux modes et à l’origine de leur financement ? Quels modèles alternatifs à YouTube peuvent émerger de façon pérenne ? Dans quelle mesure ces modèles peuvent-ils intégrer tout à la fois le financement de la vidéo sur internet, sa diffusion et une sélection de contenus qualitatifs tant dans la forme que dans le fond ? D’ailleurs, quelles sont les exigences auxquelles doit répondre un contenu audiovisuel diffusé sur le web pour être de qualité ? Que peuvent enseigner aux créateurs et aux annonceurs les difficultés qu’ils rencontrent depuis plusieurs années pour captiver l’internaute ? La vidéo sur internet demeure-t-elle encore aujourd’hui un eldorado à conquérir ?
Une vidéo financée par ceux qui la regardent
100 000 : c’était le nombre d’années avancé en 2017 par Google pour qu’un internaute puisse regarder le milliard d’heures de vidéos disponibles sur sa plateforme. Quand certains les laissent défiler puis s’y endorment, au sens propre comme au figuré, d’autres abordent le “phénomène” différemment. Ce fut notamment l’intention d’Aurélien Galy et de Pierre Antoine Arvois lorsqu’ils eurent l’idée de créer Takotak. “Nous nous sommes rendus compte qu’il y avait des vidéos très qualitatives. Mais qu’elles étaient noyées dans un océan de vidéos qui servaient principalement de supports à la publicité en ligne. Et pas à nous rendre meilleurs ou plus intelligents.”
Après deux ans de développement et de tests, le version aboutie de Takotak voit le jour le 18 mars 2020. La plateforme est présentée comme “un intermédiaire en financement participatif. Une solution permettant aux chaînes YouTube de se faire rémunérer par leur communauté et/ou par celle de Takotak.” Autrement dit, le “KissKissBankBank de la vidéo culturelle et de vulgarisation” cherche à accompagner l’évolution des modes de consommation des médias sur le web.
“Les abonnements et les subventions ont été remplacés par un contenu gratuit financé par la publicité. Dès lors, le client n’était plus le même. Et le fait que les annonceurs cherchent à préserver et à maximiser leurs intérêts économiques n’a pas aidé dans la création de contenus de qualité”, explique Aurélien Galy. Avant d’ajouter : “L’endroit où on retrouve la valeur a changé. Toute comme la façon dont celle-ci s’exprime économiquement. L’usage de crowdfunding renvoit à ces nouvelles tendances que nous avons pu observer.”
Vidéo sur internet : répondre à une stratégie et à une promesse
Alors que tout un pan d’internautes était biberonné aux contenus “gratuits”, une hypersélectivité s’est progressivement diffusée chez d’autres. Ainsi voit-on des anonymes financer les vidéos et chaînes réalisées par des créateurs indépendants via des plateformes de financement participatif, à l’instar de Takotak ou Tipeee. Mais également un retour à l’abonnement, tant pour accéder aux contenus des plateformes et médias on web sans le concours de la publicité. Que pour héberger, diffuser et préserver la propriété des contenus audiovisuels produits, comme c’est le cas avec Vimeo.
Mais au-delà du financement, des droits d’auteur et des technologies, quid des nécessités connectées à la conception d’une vidéo sur internet de qualité ? “Il faut être en mesure de répondre à la fois à la diversité et à l’exigence de la demande. Et ce, grâce à des offres variées, originales et de qualité”, avance Stéphane Sauval. Cet ancien responsable des programmes du réseau France Bleu a fondé son studio de création audiovisuelle indépendant, Rogers Prod, en 2018. “Imaginer, concevoir et réaliser : un projet doit être pensé en amont dans sa globalité. Avant de penser à la production, à la sélection et à l’optimisation des contenus, il est essentiel de s’interroger sur sa stratégie.”
En outre, entre les fonds verts, les vidéos “audio” (autrement dit, des podcasts) et des intervenants peu légitimes par rapport à l’information donnée, la vidéo sur internet dévoile souvent une confusion quant à la stratégie de contenu de certaines plateformes et de nombreux annonceurs. Pourtant, sa promesse consiste initialement à offrir des informations probantes tant en matière d’actualité, d’expérience que d’analyse. “Un contenu “riche” mais mal pensé peut rater sa cible”, précise Stéphane Sauval. “Une vidéo sur internet se doit d’être dans l’air du temps. De plus, il s’agit de traiter les sujets sous un angle orienté vers des solutions. Pour susciter davantage l’engagement de l’audience.”
Vidéo publicitaire : savoir tenir sa place
L’engagement : il demeure le principal défi des annonceurs, des éditeurs, des plateformes et des médias. En ce sens qu’ils éprouvent toutes les difficultés à capter l’attention des cibles et à les fidéliser. De plus en plus. Lancée en 2006, Taboola est une plateforme publicitaire spécialisée dans la publicité native. En d’autres termes, celle qui permet aux annonceurs d’être présents sur des sites pertinents et en rapport avec leurs produits et leurs services. Début 2020, Taboola a dévoilé une étude menée en partenariat avec Nielsen, une société de mesure et d’analyse des données.
Son objet ? D’une part, l’analyse de la diminution de l’attention des êtres humains : 8 secondes en 2018 contre 12 en 2000. D’autre part, la définition du “moment de découverte” et son exploitation pour optimiser l’impact des contenus promotionnels (publi-reportages audiovisuels, vidéos publicitaires). Ainsi, une vidéo positionnée à la fin d’un article affiche de meilleures performances. Surtout si le contenu écrit, servant à introduire la vidéo en bas de page, répond à une stratégie éditoriale claire, anticipée et corrélée à la thématique de la vidéo.
Il en va de même pour les vidéos incrustées dans les flux de contenus infinis. Et ce, tant sur un site web que sur un réseau social tel que Facebook. “Les participants étaient 20% plus attentifs face à un flux de contenus infini et vertical qu’avec des articles qui n’étaient suivis d’aucune recommandation de contenu”, précise l’étude. “Les internautes ne sont pas seulement plus attentifs aux flux de contenus, ils s’y investissent aussi davantage sur le plan émotionnel. Ils affichent une réponse émotionnelle 17% plus élevée.” De quoi bousculer notamment le pre-roll, le mid-roll, le post-roll vidéo dont use YouTube. “Même si les taux de visibilité et de complétion sont élevés sur cette plateforme, cela ne signifie pas pour autant que les utilisateurs prêtent réellement attention à la vidéo publicitaire. En fait, ils peuvent même développer une forme de réaction négative à la publicité lorsqu’elle est trop intrusive.”
Vidéo sur internet : le jour d’après
Quelle histoire, quelle expérience souhaitez-vous partager dans votre vidéo sur internet ? La légitimité de celle ou de celui qui les raconte est-elle fondée ? Avez-vous pris le temps de sortir, d’aller à la rencontre de votre audience, de vous imprégner de ses réalités ? Employez-vous les techniques et les innovations comme des outils servant votre message, ou constituent-ils pour vous une finalité ? Votre stratégie éditoriale et promotionnelle existe-t-elle ? Le cas échéant, quelles sont vos ressources ? Quel est votre business model ? Votre human one ?
Au-delà, quelle est votre approche véritable ? Justifier un budget, marteler le même discours axé sur les mêmes images, le même credo et les mêmes techniques d’intrusion ? Ou participer à la réinvention de la forme par le fond ? Quel sens donnez-vous aux contenus audiovisuels que vous concevez ? Se borne-t-il à cumuler les vues en éludant les espérances de ceux qui les verront (ou pas) ? Ou s’agit-il plutôt d’immerger l’internaute dans votre univers pour qu’il y plante son propre décor tant il l’inspire ? Au-delà de la perspective consumériste, de notoriété et d’influence, résident les premiers pas des gens qui s’engageront pour vous et/ou votre marque. Qui marcheront dans les vôtres parce que votre vidéo parle d’elle-même. Sans que vous n’ayez besoin de motiver votre démarche.
Dernièrement, la toute jeune marque Asphalte a valorisé sa propre perception des choses dans ce sens. Son leitmotiv : des bonnes fringues. Point. Son but : “mettre la qualité sur le dos d’un maximum de mecs. Pour ça, on a retourné le modèle de vente classique.” En outre, elle a dévoilé une série de vidéos qui fleurent les convictions, l’artisanat, les collaborations internationales, la participation de ses cibles. Mais aussi et surtout, des vidéos qu’on aime regarder, que ce soit en pre-roll, sur leur site web ou sur Facebook. Pourquoi ? Parce qu’on apprend des choses et que ceux qui les partagent sont sur le terrain et savent de quoi ils parlent. La réalisation est professionnelle et sert le message. L’objectif marketing se fait oublier. Par conséquent, on a envie d’en voir plus puis de se laisser tenter.